"Arranged", un film de Francis BENHAMOU: une autre vision du dialogue interculturel...

Publié le par Simon

‎«Arranged » est un film « extraterrestre » en Syrie : c’est un film américain, ‎d’un réalisateur juif, évoquant les relations entre une jeune femme musulmane et une ‎jeune femme juive. Un film qui n’est pas dans l’habitude des films diffusés en Syrie. Or il est vrai que sa diffusion est en accord avec les propos du Grand Mufti de la ‎République, autorité suprême de l’état syrien chargé des questions religieuses. Les ‎religions sont toutes tolérées en Syrie malgré la situation géopolitique et les ‎altercations confessionnelles de l’autre côté du Golan. Seuls les extrémismes sont‎combattus. Mais qu’est-ce que l’extrémisme ?‎ ‎ « Arranged » est avant tout l’histoire d’une tolérance à l’américaine. Jeune ‎femme juive, dans une famille orthodoxe, Rachel a du mal à se soumettre au ‎conservatisme de ses parents notamment sur la question du mariage. Elle croit, elle, ‎en la liberté individuelle, valeur chère aux Américains et aux choix rationnels des ‎individus. Plusieurs maris lui sont proposés. En vain, elle rechigne pour ensuite se ‎décevoir. ‎ De son côté Nassira, jeune femme musulmane d’origine syrienne, provient d’une ‎famille religieuse mais tolérante. Elle a décidé elle-même de porter le voile, un voile ‎coloré, esthétique et de vivre sous la tradition familiale. Toutefois, elle aussi est ‎confrontée au mariage arrangé de ses parents, qui lui proposent plusieurs maris, sans ‎qu’aucun ne lui plaise. Elle semble en opposition également avec l’autorité parentale, ‎plus traditionnaliste quant aux questions maritales. ‎ La fin est d’ailleurs frappante. On s’aperçoit que chacune des deux filles ‎trouvent un mari, mais dans leur propre communauté. Nassira, un mari choisi par ses ‎parents mais qui lui plaît et Rachel, un mari qu’ellerencontre par hasard et qui ‎est d’origine juive comme elle.‎ Bref, une « histoire de mariage arrangé », comme tous les films pourraient en ‎diffuser, mais « à l’américaine ». La problématique de film est en effet celle de la ‎conciliation entre la liberté individuelle et la tradition, problématique essentielle du ‎communautarisme, du melting-pot américain. Or contrairement aux films américains ‎des années 90, le concept de melting pot, celui d’un mélange des communautés, donc ‎d’une liberté individuelle préférée au communautarisme est complètement abandonné ‎au profit du concept de salad bowl, plus actuel dans la sociologie des communautés ‎américaines et qui marie de manière plus égale le communautarisme et la liberté ‎individuelle. ‎ Je ne cache pas une certaine déception à cette fin de film qui à mes yeux est ‎trop fataliste et qui malgré les messages de tolérance entre les deux jeunes filles, ‎amies au-delà des fossés confessionnels qui les séparent, aurait mérité une fin plus ‎utopique avec un mariage mixte et qui ne renforce pas les communautarismes.‎ Or c’est peut-être le message principal du film. Celui de pouvoir créer des ‎ponts entre les cultures, celui d’avoir accepter des cultures différentes et un fossé ‎entre ces cultures. C’est donc en quelque sorte une vision réaliste, qui brise certaines ‎illusions de voir les communautés se mélanger, et ne pas faire de différence et de ‎pouvoir vivre côte à côte comme si de rien n’était. ‎
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